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Ambiance bon enfant mais résolument déterminée pour en finir sans attendre et une bonne fois pour toute avec le crime quotidien de la destruction atomique : tel est le sens et l'objectif de cette marche pacifique antinucléaire initiée par le CAN84 (Collectif antinucléaire de Vaucluse) et qui se déroule du 18 au 25 août 2012 sur les routes du Vaucluse, du Gard et de la Drôme. 

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7h30 - rassemblement, au petit matin, devant le Centre de l’Energie Nucléaire de Cadarache (Bouches-du-Rhône), haut lieu de la recherche et des expérimentation atomiques civiles et militaires. Ici ça bricole l’atome, ça le triture, ça le déstructure comme un enfant joue dans son carré de sable. Les radiations s’entrecroisent à tout va, diffusent de-çi de-là dans l’enceinte du CEA (Commissariat à l’Energie Atomique) à tel point que plus trop personne ne peux savoir ce qui se passe réellement sur ce site nucléaire composé de pas moins de 19 installations nucléaires de base (INB). Illustration dans le courant de l’année 2010 : on découvre avec stupeur un surplus de plus de 30 kilos de matière atomique fissile pourtant soit disant très contrôlé ! l’ASN fait les gros yeux. D’où viennent-ils ? qui les a oublié là ou déposés au fil des manipulations ? Mystère comme au temps du moyen-âge au cœur d’une industrie vantée depuis un demi-siècle comme sûr, sécurisée et maîtrisée. Si ce n’était pas si dramatique et dangereux on en rigolerait…

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7h45 – Sous les rayons du soleil naissant, les militants antinucléaires déploient l’immense banderole de plus de 30 mètres au long des grilles du CEA Cadarache « Arrêt Immédiat du Nucléaire » signé du CAN84 et en lettres immenses ; d’autres sortent les drapeux et pancartes, les couronnes d’hortensia -symbole de la lutte des japonais contre la destruction atomique- prennent place sur les têtes. Les forces de l’ordre se postent en défense du site nucléaire. Les salariés du petit-matin commence à arriver sur le lieu de travail, pas trop surpris de la présence des militants car la presse s’était fait écho les jours précédents de la « Marche pour la Vie ». Les vitres des véhicules se baissent, les tracts passent de main en main. Visages fermés ou plus accueillant c’est selon. Pas trop d’envie de discuter malgré la proposition adressée plusieurs semaines auparavant par le Collectif antinucléaire de Vaucluse aux syndicats de l’entreprise. Prise de parole d’un membre du Collectif qui rappelle l’objectif de la « Marche pour la Vie » à travers les 3 départements (Bouches-du-Rhône, Vaucluse, Gard) : aller de site nucléaire en site nucléaire en passant par les villes et villages pour dénoncer l’omerta et la loi du silence sur le crime quotidien perpétré par les installations nucléaires, rencontrer et informer les populations sur la sinistre réalité de la destruction atomique, obtenir des rendez-vous avec les élus locaux pour les conduire à prendre connaissance des « faits et arguments » et proposer aux Conseils municipaux d’adopter des vœux pour la mise à l’arrêt immédiat des installations nucléaires, rencontrer les travailleurs du nucléaire pour abattre le mur artificiel de peurs et de conflits créé entre eux et la population.

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8h00 – Les marcheurs et marcheuses s’élancent sur la chaussée pour une marche de près de 180 km. Pas pour le plaisir, pas en randonnée champêtre, mais pour huit jours afin de dénoncer la mainmise du nucléaire sur la vie et les territoires, les atteintes quotidiennes à la santé. L’ambiance est détendue et déterminé alors que dardent les premiers rayons du soleil brûlant de Provence et que montent les chaleurs encore tièdes mais bientôt étouffantes. Le rythme est soutenu et trahit une volonté farouche. La longue descente de Cadarache vers St-Paul-lez-Durance est avalée en à peine une heure. La moyenne envisagée de 3km/h est respectée. Détours par le village, coincé entre canal EDF et rivière quasi asséchée, pour remettre au maire « son » enveloppe d’arguments et discuter avec les « anciens » attablés aux terrasse du petit bistrot  ou assis sur le banc de la place principale.

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Au cours de la descente jusqu’au Pont Mirabeau les uns et les autres se découvrent, les échanges se développent, les complicités se nouent. Il y a là des jeunes, en couples ou seuls, des femmes de tout âge, des hommes aguerris ; ils sont des départements directement impliqués mais viennent aussi d’Ardèche à vélo, de la Loire en stop, des Alpes en train et bus, la cohorte est bigarrée, chatoyante comme les différents accents qui s’entremêlent. 

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10h30 - Passé le Pont Mirabeau, est à présent venue l’heure d’attaquer la montée vers le village de Mirabeau, la terrible montée, sans aucun plat, sur une route étroite ou les voitures ne peuvent se dépasser. L’air est déjà chaud, très chaud, on annonce la canicule. Chacun s’est muni de sa bouteille d’eau et de quelques aliments énergétiques. Il va falloir tenir le coup jusque vers 19h30 et parcourir ce jour plus de 25km. La journée la plus longue. Quelques arbres sur le côté et on en profite aussitôt pour souffler un peu. La côte est rude, interminable, le pied devient lourd, la semelle collante, l’effort plus intense mais la détermination n’en est que plus grande. 

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12h00 – La télé est là, FR3 a décidé de faire son direct de midi sur l’initiative du CAN84. Dans le champs de la caméra apparaissent de front, émergeant peu à peu de la côte – telle la fresque des paysans du film « 1900 » - les têtes et les corps des marcheurs. Une banderole jaune et noir « arrêt immédiat du nucléaire, ici, partout et maintenant » progresse sur l’écran. Sur fond de village « type provençal », les réflecteurs et appareils de prises de vues braqués sur lui, un militant répond aux questions en direct de la présentatrice du JT. Le travail préalable de contact avec les médias a porté ses fruits, les médias sont au rendez-vous. A surveiller la presse demain matin. La marche reprend son cours naturel, les vélos précédent les marcheurs à pieds et assurent des va-et-viens et des relais logistiques.

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13h30 – Ca tape dur, le cagnard fait son œuvre, la chaleur est étouffante. Halte au petit village de La Bastidonne pour une pause méritée et un peu de restauration en attendant que l’astre veuille bien décliner un peu. C’est l’occasion de faire le point de cette première matinée, le rythme, les séquences, les temps de repos, les ajustements entre marcheurs et vélos, la sécurité sur la route, la présence permanente des gendarmes,… C'est le moment aussi de manifester sa solidarité avec le peuple martyr japonais et de découvrir la création en origami de "Grue de la Paix" initié au lendemain du largage des premières bombes atomiques américaines sur Hiroshima et Nagashaki. 

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16h00 – On repart même si le soleil frappe dur encore. Direction Pertuis qui commémore l’entrée des alliés libérateurs de la Provence en 1945. Aujourd'hui il s'agit de libérer la Provence, la vallée Rhône-Durance et l'ensemble du pays et de la planète de la criminalité atomique. La vilel regorge de véhicules militaires, de décorés en tous genres, d'édiles de tous niveau. Et se glisse au beau milieu d'en ordonnancement réglé comme du papier à musique : le drapeau blanc du CAN84. Surprise, émoi, les flashs des photographes crépitent. La gendarmerie n'apprécie pas. Mais à présent impossible à la population amassée sur les trottoirs de ne plus savoir. Oui le nucléaire tue au quotidien!

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17h30 - Encore 6 kilomètres à parcourir pour aujour'dhui. Les mollets sont durs mais l'enthousiasme et la détermination ne faiblissent pas. D'autant que de nouveaux citoyens sont venus renforcer le groupe. Du sang frais, de l'ardeur en plus, de la fraternité augmentée. Direction le petit village de Villelaure où là encore, le maire a refusé de rencontrer les antinucléaires et de mettre à leur disposition pour la nuit un terrain avec eau potable. Il est des signes et des comportements d'élus qui ne trompent pas et renvoient aux temps passés monarchiques. Qu'à cela ne tienne, d'une part les élus locaux pourront prendre connaissance du dossier "faits et arguments contre le nucléaire et pour son arrêt immédiat" car, dans un geste renouvelé à plusieurs reprises maintenant, une enveloppe est déposée à la Mairie, et d'autre part la solidarité des habitants joue à fond : un accueil " à la ferme" est mis en place par l'ami Raymond et sa compagne. La soirée se prolongera tard et riche en discussions, en échanges, en complicité autour d'un buffet autogéré mis en place par Chantal, Cécile et Johannes. Oui la solidarité existe en France!

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Demain dimanche 19 août, nouvelle étape, autres haltes dans les villages de Cadenet, de Lauris, de Puget et de Mérindol, autres rencontres avec les habitants, nouvelles richesses humaines à élaborer en commun, amplification de la détermination contre les pourvoyeurs de mort, pour donner sa chance à la vie.

la vidéo (cliquer sur l'image)

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Portrait de marcheur et de marcheuses -  Portrait I – samedi 18 août 2012 : Chris

Elle s’appelle Chris, elle vie maritalement, sans enfant, elle à 49ans, en réinsertion professionnelle et habite Avignon. Elle est venue prendre sa place dans cette marche par ce qu’elle ne veut pas d’une société qui hypothèque la santé et l’avenir de ses enfants et des générations en devenir.

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«  C’est monstrueux de se rendre compte que tous les jours, chaque heure, les installations rejettent de la radioactivité et contaminent notre air, notre eau, notre environnement. Et tout cela avec l’accord et le feu vert des autorités, de l’Etat, des Préfets, des institutions. »

Elle n’était pas militante d’une cause particulière, attentive tout au plus au bon développement de sa vie, sensible aux causes sociales. Et puis, cette information zappée à présent par les principaux médias : au Japon, depuis la catastrophe nucléaire de Fukushima, les enfants doivent porter des dosimètres de mesures de radioactivité autour du cou, histoire de connaître la dose mortelle reçue chaque jour. Son sang n’a fait qu’un tour : « Ca jamais pour personne!»

Depuis, elle refuse que les industriels du nucléaire se servent des humains comme de simple cobayes de laboratoire grandeur nature. Les industriels avec la complicité et le soutien des institutions et des élu-e-s, « enfermé-es dans leur ignorance de la réalité de la nocivité de la radioactivité, trop contents d’être conformes à des dogmes et croyances dépassées  qui se révèlent aujourd’hui mortels et criminels ».

Chris a confié la garde de son chat et l’arrosage de ses plantes à une amie pour pouvoir lancer son cri, porter aux habitants de Provence une parole de vie libérée du conformisme et de la soumission à la propagande officielle.

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reportages photos et vidéos : Chris, Wolakota, Alex

un album complet sera mis en ligne à la fin de la "Marche pour la Vie"

* réacteurs, laboratoires, centre d’essai, usines de traitement des effluents contaminés, fonderies de matières radioactives, entrepôts de stockages de matières mortelles,….