__

Le billet initial de octobre 2013 : https://www.mcca-ain.org/2012/index.php?post/2013/10/09/Nuclear-Gate-CEA-et-manipulations-scientifiques

Commentaire de Baptiste :

« Il est scandaleux qu'un scientifique rigoriste comme vous, utilise le vocable " lobby nucléaire ". Vous devriez savoir qu'un lobby défend des intérêts privés.
Que je sache, le CEA est 100 % public, Areva est 90 % public et EEf 85 % public...Donc , globalement, le nucléaire Français appartient aux citoyens à 90 %....On ne peut pas parler de lobby !
Par contre , le "renouvelable", éolien et solaire est quasiment financé à 100 % par des capitaux privés ( fonds de pension en particulier )...Voilà un vrai lobby très puissant qui intervient à tous les niveaux de décision , depuis les élus locaux jusqu'au sommet de l'Etat ! Renseignez vous sur le nombre de maires qui sont devant les tribunaux pour "prise illégale d'intêrets " ou "conflit d'intêret" pour avoir accepté les subsides du lobby " renouvelable " ! »

Ma réponse :

Bonjour Baptiste,

à la première lecture de votre commentaire, je m'étais dit que j'allais faire une réponse cinglante !

Puis, à la réflexion, je me suis dit qu'il fallait entendre votre interrogation : Vous semblez attaché à la croyance, la foi, peut-être, en une sorte d'indépendance supérieure des organismes publics, en particulier scientifiques.

Étant issu d'un milieu populaire, avec des parents idolâtres de la science, elle qui allait être le vecteur d'un avenir éblouissant, j'ai dû, au cours de mes études, et bien longtemps encore, lors de mon parcours d'enseignant de mathématiques, véhiculer les mêmes idées.

Je ne vous en veux pas, donc ! Mais on peut, un jour, ouvrir les yeux. Et, sans doute, intervenez-vous de manière, j'espère, non liée à des intérêts personnels, mais attaché, peut-être, à une vision un peu naïve de notre service public de l'énergie...

Je vais donc répondre, tranquillement, point par point, à votre commentaire :

Tout d'abord, je ne partage pas du tout votre critique sur l 'emploi du vocable « lobby nucléaire ».

Que ce soit dans le « petit Robert », le « Petit Larousse », Wikipédia, ou wiktionnaire, la définition de l'anglicisme « lobby » est unanime et simple : « groupe de pression ». Il n'est nulle mention de « public » ou « privé » dans cette définition, ce qui n'aurait, vous en conviendrez, aucun sens.

Par ailleurs, il y a un distinguo à faire entre les organismes que vous citez : CEA d'une part, et AREVA, EDF d'autre part, ces dernières étant des entreprises capitalistes soumises, même si elles ont des capitaux publics, aux lois implacables du profit. Ces entreprises publiques, contrairement à ce que vous pouvez penser, ne sont soumises à aucune contrainte éthique, et se comportent, ont pu se comporter, comme des entreprises « voyous », par exemple en Amérique du Sud, et, a fortiori, en métropole.

Le CEA (Commissariat à l’Énergie Atomique et aux énergies Alternatives), dont vous citez l'appartenance 100% public, doit être associé à d'autres organismes, pour moi, équivalents, que sont l'IRSN et l'ASN, censés être des organismes « indépendants ».

Or, que ce soit le CEA, l'IRSN, l'ASN, l'ANDRA, ces organismes vivent de la perpétuation de l'industrie atomique. Leur mission, on le comprend bien, est donc de faire pression, de par leur « aura techniciste », pour assurer la poursuite de l'activité nucléaire, militaire et civile, quels qu'en soient les dégâts en terme de santé publique.

Si cela ne s'appelle pas un « groupe de pression », que je sois pendu !

Le terme de « lobby nucléaire » est donc parfaitement adapté à ces « groupes de pression » qui imposent la poursuite de cette industrie qui engendre maladies et accident majeur inévitable, en nous faisant croire, contre toute réalité scientifique, que … tout va bien !!!

Quant à ce que vous dites du « renouvelable », les illégalités, malversations, … dont vous faites état, je vous en fait crédit ! Il est effectivement très possible que des projets « renouvelables » soient liés à des malversations, des conflits d'intérêt, sans doute, je veux bien vous en faire acte, sans preuve évidente, mais bon...

Il faut alors, sur ce sujet, préciser quelques éléments incontournables :

  • Si le « renouvelable », comme vous dites, est 100% privé, c'est que les organismes publics, tels EDF, ont préféré se ruiner avec une technologie moribonde, le nucléaire, qu'on soutient à bout de bras, qu'on veut « grand-caréner », plutôt que d'investir publiquement dans le renouvelable. Les centrales nucléaires appartiennent à l’État, les parcs « renouvelables » appartiennent au « privé ». C'est un choix éminemment politique, et uniquement politique !

  • Et, malheureusement, ce n'est pas parce que le secteur « renouvelables » serait « public », que les choix énergétiques nationaux ne seraient pas soumis aux lobbies de l'atome et de la loi du profit, que représente, essentiellement, en France, pour ce qui est du volet scientifique, le CEA et … l'IRSN.

  • La part « renouvelables » dans l'organigramme du CEA est réduite à portion congrue ! (voir sur leur site ! ) L'essentiel des travaux de recherche qu'on voit publiés par cet organisme concerne le nucléaire (verres nucléaires, ...) et … les outils de décontamination à mettre en place après l'accident majeur que TOUS SAVENT INÉVITABLE ! Si le mot « appartenance au lobby nucléaire » n'est pas approprié à cet organisme, alors ...

  • Aucune recherche sérieuse n'est développée par ces organismes publics sur le « stockage de l'énergie », (hydrogène, air comprimé … ). Nous attendons que nos « partenaires » européens et planétaires fassent le travail...

  • Aucune recherche sérieuse n'est développée par ces organismes publics sur les renouvelables, la production contrôlée en matière de matières premières (néodyme pour les éoliennes, fabrication et recyclage de modules photovoltaïques les plus propres possibles,… ), sur la performance énergétique (allemands et chinois y sont excellents ! ). Bref, rien, en France, si ce n'est l'atome !!!

Il me reste à dire un mot du « scandale » provoqué par un « scientifique rigoriste » comme moi !

Tout d'abord, je ne suis pas un « scientifique». J'ai enseigné les mathématiques, mais n'ai jamais produit de thèse ou de publication, qui serait la caractéristique de cette appellation ! Je ne fais donc pas partie du sérail, Certains me l'ont d'ailleurs largement fait sentir.

Néanmoins, je parle de la voix du simple quidam, qui est assez allé à l'école ( en sera-t-il encore le cas avec les projets de réforme de notre gouvernement, reléguant les sciences mathématiques et physique au rang d'options) pour décrypter les thèses et publications des « scientifiques » institutionnels.

Je ne sais ce qu'est le vocable de « rigoriste », mais j'accepte d'être un citoyen amoureux de la rigueur, et scandalisé (chacun ses sujets de scandale), par les manipulations de la science institutionnelle, et ses manquements à la dite « rigueur ».

J'espère avoir répondu le plus honnêtement possible à votre interrogation.

Pour information, je vous conseille de visionner l'émission de La Chaîne Parlementaire « ça vous regarde » diffusée ce 15 février 2018, et intitulée « Centrales nucléaires : des bombes à retardement » :

https://www.dailymotion.com/video/x6eta0b

les « institutionnels » présents (IRSN avec son vice président Thierry Charles, Claude de Ganay, député LR, membre de l'OPECST du Parlement ) ont été inexistants. Le journaliste Arnaud Ardouin, bien que sympathique, a montré, lui, l'étendue de son ignorance. Et Thierry Gadault a su, preuves à l'appui, les mettre en difficulté. Le lobby tremble, semble-t-il ! ;-)))

Gilbert Tallent, 17 février 2018