__

Alors qu'EDF cumule une dette colossale de 33 milliards d'Euros et perd des centaines de milliers de clients qui passent à la concurrence, tels de vulgaires abonnés à la téléphonie mobile privée, l'entêtement de l'électricien à vouloir prolonger son parc nucléaire obsolète et lancer de nouvelles centrales atomiques type EPR (qu'il ne sait pas construire) pour des montant de plusieurs milliards d'€uros, relève d'une quasi folie.

2019-04-17_EDF-graphique.jpgD'autant que, appliquant les exigences de la Commission Européenne de livrer au secteur privé ("libéraliser") toutes les sources d'énergies (électricité, gaz, pétrole, hydraulique, solaire, éolien,...), l'Etat s'attèle à dépecer EDF tout en essayant de garder la main sur le fondement de l'arme atomique : le parc nucléaire français et son maître le CEA.

Construits dans les années 1970 et 1980, avec l'argent des contribuables et selon les plans de l'Etats-unien Westinghouse à qui une redevance était versée chaque année par la France, les 58 réacteurs atomiques sont depuis largement amortis. Mais leur entretien coûte à présent une fortune.

L'électricien est plombé par le déclin de ses parts de marché, son rachat d'une partie de l'ex-Areva, les déboires de l'EPR de Flamanville, ses folies d'investissement en Grande-Bretagne pour tenter d'y construire 2 EPR, et un coûteux programme du "grand carénage" visant coûte que coûte à prolonger ses vieilles casseroles.

Comment alors dégager des moyens financiers supplémentaires, avec le feu vert de la Commission européenne et, pour les syndicats, le refus de scinder le groupe? BNP Paribas a été mandatée par EDF pour explorer d'éventuels ressorts financiers. Quelque soit le résultat la banque y touchera sa commission.

La fuite en avant nucléaire

Un bricolage répondant au nom de code "Hercule", négocié entre l'Etat et EDF, vise à dépecer ce qui, depuis dix ans, n'est plus le patrimoine national créé par le Programme de la Résistance en 1945. Le privé veut reprendre ce qui lui appartenait avant 1945 et les services publics du gaz et de l’électricité sont attaqués par tous les moyens. Le démantèlement s'est opéré par une entente cordiale entre la Direction de EDF, l'Etat, la Commission Européenne, les syndicats. Chaque partie négociant ses petits avantages.

La loi NOME (« Nouvelle organisation du marché de l’électricité ») de 2010 répond à cette injonction de libérer complètement le marché de l’électricité et impose à EDF de céder près du quart de sa production nucléaire à la concurrence. Sous la présidence de Nicolas Sarkozy, Gaz de France (GDF) s’allie avec Suez et aboutit à la création d’ENGIE, société qui sera  privatisée malgré la promesse qu'elle ne le serait  pas.

En 2011, le gouvernement Fillon sous l'ère Sarkozy avait inventé, pour accompagner le démantèlement du groupe souhaité par Bruxelles, le dispositif "Arenh": un accès des fournisseurs alternatifs privés à un quart de la production nucléaire d'EDF, à un prix d'achat avantageux. Dans l'affaire EDF y perdait des centaines de millions d'euros mais gardait la main sur tout le reste. La fin de ce dispositif, souhaité par EDF, est annoncée pour 2025. Solution : augmenter les tarifs de l'électricité payés par les usagers-consommateurs (+ 5,9% prévus début 2019 et repoussés à juin 2019 pour cause de mouvement des "gilets jaunes").

A présent, la Commission européenne a lancé la procédure de privatisation des barrages hydro-électriques.

Pas de retour en arrière, pas d'avenir possible, seuls le profit et la prédation comptent

Le plan qui se dessine aujourd'hui vise a "re-nationaliser" une partie de l'électricien qui avait été privatisée sous les gouvernements précédents et à en privatiser une autre partie. Une maison-mère de production à 100% publique serait propriétaire des activités nucléaires (française mais aussi britanniques) dans laquelle EDF voudrait mettre aussi les barrages hydrauliques mais dont l'U-E exige pourtant la privatisation. Cette entité contrôlerait, en l'état actuel de la dépendance à l'atomisme, 80% de la production d'électricité française.

dechets-EDF.jpgPar ailleurs, deux filiales principales s'occuperaient des énergies renouvelables, des services (tel Dalkia, les voitures électriques nucléaires), de la fourniture/distribution de l'électricité comme le font actuellement les filiales détenue à 100% par EDF : RTE et Enédis (ex-ERDF). Celles-ci pourraient ainsi facilement être privatisées le jour venu surtout si l'hypothèque nucléaire et les déchets toxiques mortels sont refourgués au public ainsi que les dettes. Alors si, le compteur-espion engrangeur de données multiples sur les consommateurs et radiatif, Linky, est dans l'escarcelle ainsi que les bornes électriques des voitures nucléaires : c'est du tout cuit.

Autrement dit, l'Etat et la Direction d'EDF acceptent de livrer au privé la distribution, le réseau, les raccordements jusqu'au consommateur final, du moment que la production nucléaire reste sous contrôle et que l'Etat puisse y déverser à son bon vouloir des milliards d'euros pris dans la poche des contribuables.  Depuis deux ans, sous Hollande comme sous Macron, 7 milliards d'euros ont été donné à Areva-Orano et 3 milliards à EDF. Précédemment Sarkozy avait engagé le pays dans un grand emprunt à rembourser dont une bonne partie a été affectée au Commissariat à l'Energie Atomique. Et de de 2015 à 2020, l'Etat à pris la quasi-intégralité de ses dividendes en actions plutôt qu'en espèces évitant ainsi à EDF de débourser le moindre euros et faisant de l'Etat, en cas de faillite, le débiteur et bailleur de fonds de l'électricien.

Contre-partie souhaitée par EDF : l'abandon du dispositif Arenh.

Comme on le voit, quelque soit le cas de figure, l'argent coulera à flot dans les deux sens. Pour le privé qui exploitera les structures déjà payées par les français et le marché qu'ils représentent, et pour les nucléocrates "publics" et l'armée qui pourront soutirer comme bon leur semble la manne financière des contribuables. D'ailleurs le titre EDF qui avait perdu plus de 12 % ces six derniers mois (après avoir été éjecté du CAC 40 voici 2 ans) a pris 3,34 %. Les spéculateurs se frottent d'ores et déjà les mains. Au milieu de ce montage libéral, les consommateurs et les salariés n'ont évidemment pas leur mot à dire.

Quant à Engie, la vente au privé a été votée mi-mars à l'Assemblée nationale par 45 députés présents sur 577, à 6h du matin, avec les aéroports de Paris et la Française des jeux. Les ultra-libéraux de la Commission Européenne, les gouvernements français successifs, les directions des entreprises et actionnaires, veulent créer un grand marché unique et dérégulé de l’électricité et du gaz qui doit s’imposer à l’ensemble de tous les États membres. La prédation est lancée.

Entériner à tout jamais le crime atomique

repression_Bure_evacuation-de-la-zad.jpgLa stratégie en cours rend caduque l’idée même d’aborder la question de la sobriété énergétique, de réduire la production d’énergie et d'aller dans le sens d’une réduction de la sur-consommation. A aucun moment il n'est question d'arrêter le nucléaire, ses rejets continus de radioactivité attentatoires à la vie et à la santé, sa production de déchets mortels. A aucun moment, l'Etat, EDF, les syndicats (qui sont tenus hors du jeux jusqu'à fin juin par les libéraux de tous bords et ne souhaitent qu'une chose, dans un arc-boutant corporatiste : que EDF reste industriellement ce qu'il est) ne profitent de l'occasion pour tourner la page définitive du crime atomique et ouvrir ce faisant un avenir au pays, à la planète, aux générations futures.

Honte à eux.

JPS